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mardi 19 mars 2024

Retour sur la fête de la Cité de l’Immaculée le 1er mai 2016 !

Un rappel du programme de cette magnifique journée :

10h30 Enseignement de Mgr Thierry SCHERRER, évêque de Laval
11h30 Messe présidée par Monseigneur
Déjeuner
14h30 Témoignages
16h00 Procession et bénédiction de la librairie St Joseph
17h00 Adoration du Saint Sacrement

Vous trouverez ci-dessous, le texte de l’homélie de Monseigneur Thierry SCHERRER, évêque du diocèse de Laval, et le texte de son enseignement.

Homélie de Monseigneur SCHERRER

6° dimanche de Pâques C
20° anniversaire de la Cité de l’Immaculée

Mes amis,

L’évangile de ce jour nous révèle l’une des plus belles promesses que Jésus fait à ses disciples : venir, le Père et lui, habiter chez nous, dans notre intérieur, dans ce que la Bible appelle notre cœur : « Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole. Mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui, nous irons demeurer auprès de lui ». Ces mots ont quelque chose de vertigineux : ce n’est pas nous en effet qui nous élevons au ciel jusqu’à Dieu, c’est Dieu qui descend du ciel vers nous pour y établir sa demeure. Et ce Dieu veut venir en nous comme s’il était chez Lui. C’est une promesse magnifique qui nous apporte aussi une espérance indéfectible, celle d’être certain de ne pas être abandonnés. Non, nous ne sommes pas délaissés, nous ne sommes pas orphelins ! Dieu nous fait le cadeau quotidien de sa présence. Il nous aime puisqu’Il vient demeurer chez nous. Il fallait le départ de Jésus pour que cette inhabitation se produise : « Je m’en vais, et je reviens vers vous », nous dit Jésus. Jésus s’en va, mais par le don de l’Esprit, c’est la Trinité tout entière qui vient habiter chez nous. C’est inouï quand on y pense. Si seulement nous savions un peu ce que nous sommes et la part d’infini et d’éternité qui demeure en nous ! Les mots de Jésus nous donnent de rendre grâce d’abord pour la merveille de notre baptême. Car c’est bien par ce sacrement que nous avons été plongés un jour dans l’amour de Dieu ; c’est bien par ce sacrement que nous sommes devenus enfants du Père ; c’est bien dans la dynamique de cet engendrement dans la foi que la Trinité a daigné faire de nous sa demeure.

Que Dieu soit intérieur à nous est la grande découverte qu’a faite en son temps saint Augustin, une expérience fondatrice qu’il nous raconte dans les Confessions. On connaît cette phrase fameuse : « Je T’ai aimée bien tard, Beauté si ancienne et si nouvelle, je T’ai aimée bien tard ! Mais voilà : Tu étais au-dedans de moi quand j’étais au-dehors, et c’est dehors que je Te cherchais ». Dieu n’est pas au dehors : il est « plus intime à moi-même que moi-même », dira aussi Augustin qui découvre en même temps que l’intériorité chrétienne est une intériorité d’amour. Dans le cœur du croyant coule une source : la source fraîche et vivifiante de l’amour des Trois qui éternellement se donne et se reçoit et qui veut nous entraîner dans sa course, nous emporter dans son élan. Et c’est donc seulement en descendant dans les profondeurs du cœur pour y rencontrer le Christ qu’on se rencontre soi-même et qu’on accède à son vrai moi, à sa véritable identité. Voilà la grande découverte qui va changer la vie d’Augustin. Plus proche de nous, Madeleine Delbrel écrivait : « Si tu vas au bout du monde, tu trouves la trace de Dieu. Si tu vas au fond de toi, tu trouves Dieu lui-même ».

Le fait que Dieu soit intérieur à nous-mêmes a des implications immédiates et concrètes dans la manière dont nous vivons et pratiquons notre religion. D’abord à travers l’expérience de la prière qui n’est pas une fuite, une évasion hors de notre condition humaine, mais une descente au plus profond de soi-même pour y découvrir la présence d’un Dieu qui est déjà là et qui nous attend. Mais aussi dans la manière dont nous mettons nos convictions en pratique : en ce sens, notre foi chrétienne ne se réduit pas à l’observance de règles tatillonnes, elle se vit essentiellement dans une relation au Christ et, par lui, aux autres qui est de l’ordre justement de l’amour. Dans l’Église, en définitive, tout se joue dans la manière dont nous essayons de vivre le commandement nouveau de l’amour dans le respect des sensibilités de chacun et dans le souci de la fraternité et de la communion. Tout le reste est secondaire.

J’ajoute à ces deux implications concrètes une troisième qui a une conséquence immédiate sur notre vocation missionnaire, c’est-à-dire sur notre collaboration à l’œuvre du salut. Quand Jésus dit qu’il vient faire sa demeure en nous, il faut bien peser le sens des mots. Faire sa demeure, en effet, veut dire : demeurer d’une façon stable, et non pas rendre visite en passant. Faire sa demeure, cela veut dire : demeurer de telle façon que Dieu devienne en quelque sorte le propriétaire de la maison habitée. Il le deviendra de plus en plus dans la mesure où les propriétaires que nous sommes lui cèderont la place jusqu’à ce que finalement Il prenne possession entièrement de leur vie, qu’Il soit le maître de leur existence. Que nous dormions, que nous mangions, que nous travaillions, tout cela doit reposer au quotidien entre les mains du Seigneur qui veut agir à travers nous comme à travers des instruments dociles. L’unique condition posée par Dieu, quand il s’apprête à prendre possession de quelqu’un, d’établir sa demeure en lui, dans son cœur, c’est l’amour : « Si quelqu’un m’aime… ». Et c’est justement de cette façon que Dieu a décidé de se manifester au monde. Il ne veut pas convertir le monde une fois pour toutes, par un miracle retentissant. Il veut plutôt convertir des cœurs, des individus, et faire de chacun d’eux une demeure pour d’autres. Il veut distribuer sa lumière, la faire rayonner dans les ténèbres à partir de nouveaux centres.

C’est tout l’enjeu de cet anniversaire que nous célébrons dans la joie. De cette Cité de l’Immaculée qui a vu le jour il y a vingt ans, Dieu veut faire un centre de rayonnement de l’Amour qui puisse toucher les cœurs, surtout le cœur de ceux et celles qui sont blessés, le cœur des petits et des pauvres. Sous la houlette de Marie, la maîtresse des lieux, le Seigneur veut faire de la Cité de l’Immaculée un phare lumineux au cœur de notre Église diocésaine, un phare qui soit comme une irradiation intense de la Gloire de Dieu. C’est la vision que nous faisait contempler saint Jean dans la deuxième lecture avec cette évocation splendide de la céleste Jérusalem, terme de notre pèlerinage ici-bas. « Notre cité se trouve dans les cieux, nous verrons l’épouse de l’Agneau », c’est un chant fétiche de la communauté en ce lieu. Notre cité se trouve dans les cieux, oui, mais cette cité se construit déjà ici-bas avec tous ceux qui, dans l’élan joyeux de l’Esprit, veulent œuvrer, veulent coopérer généreusement à l’édification de la civilisation de l’Amour. Cité de l’Immaculée, sois fière, sois heureuse de prendre part à cette mission magnifique et si déterminante pour aujourd’hui. Ton rayonnement ne fait que commencer. Il s’intensifiera jour après jour si tu mets ta confiance dans le Seigneur, si tu te laisses conduire par Marie jusqu’à ce sanctuaire céleste où se tient l’Agneau immolé et toujours vivant, Lui qui veut, par ses rayons lumineux, transfigurer ce monde encore plongé dans les ténèbres du mal. Que cet Agneau devienne chaque jour un peu plus ton flambeau, ta raison d’être et de vivre, la source de ta joie. Je reprends, en te les adressant d’une manière personnelle, ces mots du psalmiste entendus tout à l’heure : « Que Dieu te prenne en grâce et te bénisse, que son visage s’illumine pour toi. Alors son chemin sera connu sur la terre, son salut, parmi toutes les nations ».

Amen.

Enseignement de Monseigneur SCHERRER

20° anniversaire de la Cité de l’Immaculée

1er mai 2016 – Enseignement : Jésus, Roi de Miséricorde

Introduction

Nous allons porter nos regards sur Jésus Roi de Miséricorde. C’est la grâce de cette année jubilaire. J’ai eu déjà l’occasion de m’exprimer sur ce thème dans ma dernière lettre pastorale intitulée Dieu ne se lasse pas de tendre la main. Ne manquons pas le rendez-vous de la Miséricorde.  Volontiers j’y  reviens ce matin pour l’approfondir avec vous. Quand on parle de miséricorde, on touche le secret de Dieu. Car la miséricorde, c’est un mystère d’amour. C’est le cœur de Dieu en tant qu’il est tourné vers notre misère. La miséricorde est une modalité de l’Amour divin, c’est l’expression, c’est la manifestation de l’Amour divin face à souffrance de l’homme et à son péché. Déjà, en nous créant, Dieu a fait preuve de miséricorde envers nous. Il connaissait par avance les péchés que nous allions commettre contre lui, mais son amour fou, son amour en besoin de se répandre, de se communiquer, l’a comme « contraint » (Sainte Catherine de Sienne) à nous créer, à nous donner l’être, en nous faisant à son image et ressemblance. Mais face au péché qui est comme la rébellion de l’homme contre Dieu, le don va se faire pardon. Le fait en effet de refuser son amour crée comme une blessure dans le cœur de Dieu. Nous atteignons là à une nouvelle dimension de l’Amour de Dieu, un amour qui va s’exprimer sous le mode de la compassion et de la souffrance. Au III° siècle, Origène, Père de l’Église, va jusqu’à parler d’une « passion d’amour » que le Père a subie pour nous. (Homélie sur Ezéchiel, 6,6). Cette passion d’amour va atteindre son sommet dans l’incarnation rédemptrice du Fils de Dieu. « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique ». En Jésus, Dieu fait homme, l’Amour miséricordieux du Père s’est incarné dans notre histoire. Le Christ mort et ressuscité est en personne l’Amour miséricordieux de Dieu qui a pris sur lui tout le mal du monde pour nous libérer de sa domination. L’incarnation est la possibilité que Dieu s’est donnée dans le Christ de souffrir, d’avoir des entrailles de miséricorde (rahamim), d’éprouver des sentiments de compassion, de mourir pour nous.

Lire saint Jean-Paul II, DV, 39. Dans l’humanité de Jésus Rédempteur se concrétise la ‘souffrance’ de Dieu.

La miséricorde est vraiment le dernier secret sur Dieu et cela explique de quelle manière cette thématique a guidé tout le pontificat de Saint Jean-Paul II et comment elle est aussi en train de guider celui du Pape François. On se souvient de la devise que le Pape François a choisie pour son pontificat : Miserando atque eligendo, devise tirée d’une homélie de saint Bède le Vénérable commentant l’appel de saint Matthieu et que l’on pourrait traduire ainsi : « Choisi parce que miséricordié ».  En Jésus, la miséricorde est un don à contempler, un don à accueillir, un don à partager. Ce sont les trois parties de cette conférence.

1. Un don à contempler

« Jésus est le visage de la miséricorde du Père », c’est le titre de la bulle d’indiction de l’année jubilaire signée par le Pape François. L’auteur de l’épître aux Hébreux l’appelle d’ailleurs « le grand Prêtre miséricordieux ». L’auteur écrit en 4,15-16 : « Nous n’avons pas un grand prêtre incapable de compatir à nos faiblesses, mais un grand prêtre éprouvé en tout à notre ressemblance, exception faite du péché. Approchons-nous donc avec assurance du trône de la grâce, pour recevoir miséricorde. » Si donc Jésus est le visage de la miséricorde du Père, alors la miséricorde est d’abord un mystère à contempler. La contemplation de la miséricorde de Dieu passe par le regard que Jésus porte sur nous et par celui que nous portons sur lui. C’est le regard de Jésus et le regard  sur Jésus.

Je ne sais pas si vous avez fait l’expérience de lire un évangile d’une seule traite, l’évangile de Matthieu, par exemple. Quand on parcourt cet évangile, on est frappé d’y voir Jésus dans un mouvement missionnaire permanent. Le Jésus de Matthieu est par excellence un missionnaire de la miséricorde. Il ne cesse de sortir, de partir, de se déplacer d’un endroit à un autre, d’une rive à l’autre. Et c’est dans ce va et vient incessant que se nouent les rencontres humaines les plus riches qu’Il vit prioritairement avec des pauvres, des pécheurs, des étrangers, des blessés de la vie. Beaucoup de ces rencontres commencent par un regard d’amour, de miséricorde. Jésus voit d’un regard qui rejoint la personne dans son centre le plus intime.  Le regard de miséricorde rejoint Matthieu (Lévy) dans l’instant même où il l’appelle à le suivre (9,9). Pensons également à la femme hémorroïsse ((9,22), au jeune homme riche (Mt 19,16 sq), et tant d’autres encore. Au cœur de cet évangile, l’appel des Douze revêt une signification particulière : en les envoyant en mission, Jésus leur donne le pouvoir d’expulser les esprits impurs, d’aller vers les brebis perdues, de guérir les malades, en n’ayant pas d’autre richesse que l’amour (ch. 10). Il est significatif d’ailleurs que Matthieu évoque juste avant cette péricope la pitié de Jésus face à la misère des foules. Les prêtres sont choisis pour être les ministres de la miséricorde. Aujourd’hui encore le « regard » de compassion du Christ ne cesse de se poser sur les hommes et sur les peuples. Par ce regard, Jésus embrasse les personnes et les multitudes, et il les remet toutes au Père, s’offrant lui-même en sacrifice d’amour pour chacune d’elles. Je pense aussi au regard de Pierre après son reniement. C’est saint Luc qui nous livre ce détail (Lc 22,61-62). Par trois fois Pierre renie Jésus, juste au moment où il devait lui être plus proche ; et au moment où il commence à désespérer, au moment où il commence à toucher le fond, il rencontre le regard plein d’amour de Jésus. C’est comme si ce regard remplaçait les mots pour dire à Pierre : « Pierre, n’aie pas peur de ta faiblesse, aie confiance en moi » ; et Pierre comprend, il perçoit les profondeurs de ce regard d’amour de Jésus sur lui et il pleure. Qu’il est beau, ce regard de Jésus sur son disciple ! C’est un regard qui nous dit que l’amour de Dieu sera toujours plus grand que notre péché. C’est un regard qui nous invite à la confiance. Dans son Commentaire sur le prophète Joël, saint Jérôme écrit : « Ne désespérez pas du pardon, quelle que soit l’énormité de vos crimes, car une grande miséricorde effacera de grands péchés » (LH, vendredi 21° semaine). Impossible de ne pas évoquer aussi le regard du père de la parabole du fils prodigue. Avait-il, ce père, oublié son enfant? Non, jamais. Il l’attendait chaque jour, à chaque instant. Et dès qu’il l’aperçoit, il se précipite vers lui pour se jeter à son cou et l’embrasser avec tendresse.

La miséricorde passe aussi par le regard que nous portons sur Jésus crucifié. C’est l’appel de Marie à Pontmain. Marie en ce lieu nous montre la croix de Jésus, la croix rouge ensanglantée, pour que nous puissions y reconnaître le signe, la preuve que Dieu nous aime infiniment plus que nous pouvons l’imaginer. Je le disais lors de notre rassemblement de Pentecôte à Pontmain l’an dernier : seule une amitié régulière avec Jésus, entretenue par la prière quotidienne et la grâce des sacrements, nous fera percevoir à quel point Dieu nous aime à la folie. Seul un cœur à cœur avec lui nous fera mesurer le prix que nous avons à ses yeux, et nous ferons nôtres alors, avec une immense gratitude, ces paroles de l’apôtre Paul : « Il m’a aimé et s’est livré pour moi ».

 Je voudrais dire aussi un mot sur l’expérience de l’apôtre Thomas à qui Jésus montre les plaies de ses mains et de son côté. C’est l’expérience que nous ferons au ciel : de contempler éternellement les plaies de Jésus comme la source de la miséricorde. Dans le corps du Christ ressuscité, en effet, les plaies ne disparaissent pas, elles demeurent, parce qu’elles sont le signe permanent de l’amour de Dieu pour nous, et elles sont indispensables pour croire en Dieu. Non pour croire que Dieu existe, mais pour croire que Dieu est amour, miséricorde, fidélité. Saint Pierre, reprenant Isaïe, écrit aux chrétiens : « Par ses blessures, vous avez été guéris » (1P 2,24 ; cf. Is 53,5).

Je vous lis un extrait d’une homélie de saint Bernard sur le Cantique des cantiques :

«Où donc notre fragilité peut-elle trouver repos et sécurité, sinon dans les plaies du Sauveur ? Je m’y sens d’autant plus protégé que son salut est plus puissant. L’univers chancelle, le corps pèse de tout son poids, le diable tend ses pièges : je ne tombe pas, car je suis campé sur un roc solide. J’ai commis quelque grave péché : ma conscience se trouble, mais elle ne perd pas courage, puisque je me souviens des plaies du Seigneur, qui a été transpercé à cause de mes fautes. Rien n’est à ce point voué à la mort que la mort du Christ ne puisse le libérer. Dès que je pense à cette médecine si forte et efficace, la pire des maladies ne m’effraie plus. Il se trompait donc, celui qui a dit : Mon péché est trop grand pour que j’en obtienne pardon. Il est vrai qu’il n’était pas un membre du Christ, et que les mérites du Christ ne le concernaient pas ; il n’avait pas le droit de les revendiquer pour lui, comme un membre peut dire siens les biens de la tête.

Pour moi, ce qui me manque par ma faute, je le tire hardiment des entrailles du Seigneur, car la miséricorde y abonde, et elles sont percées d’assez de plaies pour que l’effusion se produise. Ils ont percé ses mains, ses pieds, et d’un coup de lance son côté. Par ces trous béants, je puis goûter le miel de ce roc et l’huile qui coule de la pierre très dure, c’est-à-dire goûter et voir combien le Seigneur est bon. Il formait des pensées de paix et je ne le savais pas. Qui, en effet, a connu la pensée du Seigneur ? Qui a été son conseiller ? Mais le clou qui pénètre en lui est devenu pour moi une clef qui m’ouvre le mystère de ses desseins. Comment ne pas voir à travers ces ouvertures ? Les clous et les plaies crient que vraiment, en la personne du Christ, Dieu se réconcilie le monde. Le fer a transpercé son être et touché son cœur afin qu’il n’ignore plus comment compatir à mes faiblesses. Le secret de son cœur paraît à nu dans les plaies de son corps ; on voit à découvert le grand mystère de sa bonté, cette miséricordieuse tendresse de notre Dieu, Soleil levant qui nous a visités d’en haut. Et comment cette tendresse ne serait-elle pas manifeste dans ses plaies ? Comment montrer plus clairement que par tes plaies que toi, Seigneur, tu es doux et compatissant et d’une grande miséricorde, puisqu’il n’est pas de plus grand amour que de donner sa vie pour des condamnés à mort ? Tout mon mérite, c’est connaître la pitié du Seigneur, et je ne manquerai pas de mérite tant que la pitié ne lui fera pas défaut. Si les miséricordes de Dieu se multiplient, mes mérites seront nombreux, Mais qu’arrivera-t-il, si j’ai à me reprocher quantité de fautes ? Là où le péché s’était multiplié la grâce a surabondé. Et si la bonté du Seigneur s’étend de toujours à toujours, de mon côté je chanterai sans fin les miséricordes du Seigneur. Est-ce là ma justice ? Seigneur, je ferai mémoire de ta seule justice, car c’est elle qui est devenue ma justice, puisque pour moi tu es devenu justice de Dieu. »

Je voudrais évoquer également les révélations de Jésus à sœur Marie-Marthe CHAMBON, une religieuse visitandine de Chambéry. Lire p. 22 et 32.

2. Un don à accueillir

On ne connait la miséricorde que par l’expérience qu’on en fait. C’est un peu comme l’amour. Je connais l’amour en le recevant pour l’échanger, de même je ne connais la miséricorde que si je la reçois pour la transmettre et en être témoin. La miséricorde est infinie et la seule urgence pour nous consiste à pouvoir s’ouvrir à la miséricorde, à se laisser rejoindre par elle. Jésus nous dit : « Venez à moi, vous tous qui peinez et ployez sous le poids du fardeau, et moi je vous soulagerai ». Nous sommes tous des êtres blessés quelque part. Nous avons tous des pauvretés et des fragilités. Plutôt que d’essayer de les dissimuler aux yeux des autres ou de nous en culpabiliser, le Seigneur nous demande de nous en réjouir profondément en réalisant ce que ces pauvretés attirent de grâce et de miséricorde.

Saint Irénée écrit : « La Gloire de l’homme c’est Dieu, d’autre part, le réceptacle de l’opération de Dieu et de toute sa sagesse et de toute sa puissance, c’est l’homme ». Et il ajoute aussitôt : « Comme un médecin fait ses preuves chez ceux qui sont malades, ainsi Dieu se manifeste chez les hommes » (AH III,20,1). Ces mots nous renvoient spontanément à l’évangile de la résurrection de Lazare. Car Jésus vient vers son ami Lazare comme un médecin va vers un malade pour faire resplendir dans cette maladie même, qui est celle du péché conduisant à la mort, la toute-puissance de son Amour, ce qui est la Gloire proprement dite : « Seigneur, celui que tu aimes est malade. Cette maladie, répond Jésus, ne mène pas à la mort, elle est pour la Gloire de Dieu, afin que le Fils de Dieu soit glorifié » (11,3-4).

Jésus est venu vers Lazare comme le bon berger vient chercher sa brebis perdue. Le bon berger connaît ses brebis, ses brebis le connaissent (cf. Jn 10,14), et ses brebis, il les mène dehors, il les fait sortir (cf. 10,16) ; autrement dit, il les conduit des ténèbres à la lumière, de l’esclavage du péché à la liberté de l’Amour, ce qu’illustrent admirablement les paroles de Jésus au tombeau : « Lazare, viens dehors ! Et le mort sortit les pieds et les mains liés de bandelettes, son visage était enveloppé d’un Suaire. Jésus leur dit : « Déliez-le, et laissez-le aller » » (11,43-44). « Déliez-le ! » dit Jésus : parfaite illustration de l’œuvre de miséricorde au cœur-même de notre péché. Si le péché en effet nous ligote, l’Amour de Dieu, lui, rend libre, il délie. « Déliez » (solvite, en latin), c’est le verbe de l’absolution, et c’est le pouvoir que Dieu a remis à l’Église par Pierre : «  Tout ce que tu auras délié (quodcumque solveris) sur la terre sera délié dans les cieux » (Mt 16,19).

Difficile de ne pas dire quelques mots de ce sacrement merveilleux qu’est la confession. Le Jubilé extraordinaire de la Miséricorde doit être l’occasion de redécouvrir ce sacrement tellement déterminant pour la vitalité de la foi et pourtant si négligé de beaucoup de chrétiens. Ce sacrement est le lieu privilégié où se vit l’expérience qui nous fait rencontrer le visage miséricordieux du Christ : la misère de notre âme rencontre la miséricorde infinie de Dieu, et c’est une recréation prodigieuse qui s’opère alors par l’intermédiaire du prêtre qui agit au nom et dans la personne du Christ Jésus Lui-même. Expérimenter la miséricorde, c’est donc remettre au centre ce sacrement puisqu’il donne de toucher de nos mains la grandeur de la miséricorde. Dans ce sacrement, Dieu nous montre et nous fait part de sa miséricorde jusqu’à l’infini. Bien sûr, il y a la difficulté de nous confesser, mais plonger une bonne fois dans l’amour recréateur est source de paix et de joie. « La paix soit avec vous », dit Jésus, il ne leur fait aucun reproche. C’est le premier acte de Jésus après sa résurrection : il confie aux apôtres le sacrement du pardon, fruit de sa mort et sa résurrection. Je lis ce récit en Jn 20,19-23. « Jésus vint et se tint au milieu de ses apôtres. Il leur dit : la paix soit avec vous ! Cela dit, il souffla sur eux et leur dit : Recevez le Saint-Esprit. Ceux à qui vous remettrez leurs péchés, ils leur seront remis ; ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus ». J’attire votre attention sur le fait que la confession a été instituée par Jésus le soir de Pâques. Certes, tous les sacrements sont intimement reliés au mystère pascal de la mort et de la résurrection de Jésus. Mais pour la confession, il saute aux yeux qu’on a affaire au sacrement de la recréation par excellence. Seule une pratique régulière de la confession nous fera comprendre à quel point le cœur de Dieu est vulnérable comme l’est celui d’une mère et qu’il peut « s’émouvoir jusqu’aux entrailles » (ce sont les mots mêmes de Jésus dans la parabole) lorsqu’un de ses enfants, déchiré par les épines du péché, s’en revient du pays de perdition pour lui faire l’aveu de sa misère. C’est alors que son cœur éclate et déborde de compassion.

Nous rêverions parfois d’une existence sans accrocs. Il nous faut donner à Dieu notre histoire en son entier pour qu’il en fasse ce qu’il veut, pour qu’il la recrée à partir de notre néant. Au lieu de prétendre tout effacer de sa vie : on « réinitialise », comme on le dit en informatique ! Mais cela est une illusion puisque de son passé, il en reste toujours quelque chose. Pensons à la femme samaritaine que Jésus rencontre au puits de Jacob et que Jésus va réconcilier avec son histoire, avec elle-même. Il va permettre à cette femme de s’ouvrir à la vérité, de faire la lumière sur son existence. Cela deviendra le cœur du témoignage qu’elle portera auprès de ses compatriotes : « Voilà un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait ». En effet, ayant reçu l’eau vive que le Christ lui offre, elle peut désormais repartir à la ville et devenir la première missionnaire de la bonne nouvelle, annonçant le Christ à ceux-là même qu’elle fuyait alors.

 La miséricorde, le pardon, c’est précisément ce qui nous permet de regarder en face notre histoire, de la prendre en compte entièrement, d’assumer mais aussi de transfigurer tout ce qui fait cette histoire. Il ne s’agit pas d’effacer notre passé, mais de l’intégrer et de le mettre dans la lumière du Seigneur, de permettre à l’eau vive de la grâce de venir rendre à nouveau fertile toute notre histoire qui, parfois, nous stérilise. Pour l’évêque que je suis, c’est une première source d’émerveillement que de réaliser comment cette formidable puissance de vie nouvelle a été remise entre nos mains en vertu du sacerdoce ministériel. Rappelons-nous le récit de la guérison du paralytique au chapitre 9 de saint Matthieu. « Pour que vous sachiez, que le Fils de l’homme a le pouvoir sur la terre de remettre les péchés, lève-toi, dit Jésus au paralytique, prends ton lit et va-t-en chez toi. Et se levant, il s’en alla chez lui ». Et Matthieu de conclure : « À cette vue, les foules furent saisies de crainte et glorifièrent Dieu d’avoir donné un tel pouvoir aux hommes » (Mt 9,1-8).  Oui, comme confesseurs, nous sommes témoins des merveilles de Dieu, nous voyons littéralement s’accomplir des miracles.  « Si vos péchés sont comme l’écarlate, ils deviendront blancs comme la neige, s’ils sont rouge comme le vermillon, ils deviendront comme la laine » (1,18). Et de même cette belle parole du psaume 65 : « Jusqu’à toi, Seigneur, vient toute chair avec son poids de péché ; nos fautes ont dominé sur nous, toi, tu les pardonnes » (65,3-4). lsaïe sera relayé par saint Paul en termes pathétiques : « Au nom du Christ, nous vous en supplions, laissez-vous réconcilier avec Dieu » (II Cor. 5,20-21). C’est l’appel que je vous relaie à mon tour. Bien sûr, l’annonce de la miséricorde de Dieu dans le Christ déborde largement les frontières de l’ordre sacramentel, mais elle trouve cependant une expression privilégiée dans la réception du sacrement de pénitence et de réconciliation.

L’adoration est également un lieu béni pour déposer au pied de Jésus le fardeau de nos vies et accueillir la grâce de la miséricorde. Adorer, c’est vraiment s’approcher de la source de la Miséricorde qu’est le Cœur du Christ ! En venant l’adorer, Jésus agit avec nous comme le père de la parabole du fils prodigue. Il se penche vers nous et nous relève. En levant les yeux vers lui, nous découvrons sont Cœur transpercé d’où jaillit la Miséricorde infinie du Père. Nous sommes alors devant le Trône de la Miséricorde d’où le Christ nous tend une main secourable et nous dit : « Mon enfant bien-aimé, je suis heureux que tu sois là présent, que veux-tu que je fasse pour toi ? » « Miséricorde ! Seigneur ! » Adorer Jésus dans le Saint-Sacrement, c’est s’exposer aux rayons de l’Amour sauveur de Jésus. Tout peut être déposé devant le Seigneur en vue d’être guéri : les blessures de l’amour en général, les blessures de la rancune, de la jalousie, de la vengeance, les blessures de l’affectivité, de la sexualité, des passions désordonnées, les blessures des addictions, des mauvaises habitudes et tant d’autres.

Quelle est la clé qui nous ouvre les portes de la miséricorde ? C’est la confiance. « C’est la confiance, rien que la confiance qui doit nous conduire à l’amour », dit Thérèse. Dans le PJ de sainte Faustine, nous lisons cette parole de Jésus : « Il y a un seul moyen de puiser les grâces de la miséricorde, c’est la confiance. Plus l’âme a confiance, plus elle reçoit. Les âmes dont la confiance est illimitée me donnent une grande joie, car je répands en elles tous les trésors de mes grâces. Je me réjouis de ce qu’elles demandent beaucoup, car mon désir est de donner avec abondance, avec une très grande abondance ».

3. Un don à partager

Si Dieu miséricorde a créé l’humanité à son image, alors nous pouvons porter un reflet de l’amour de Dieu par notre propre compassion. C’est ainsi que la miséricorde reçue ne doit pas être conservée jalousement pour soi, elle doit être partagée. L’Évangile de Luc nous y invite : Soyez miséricordieux, comme votre Père est miséricordieux (Luc 6,36). Basile de Césarée dans le même sens disait : « Tu deviens à la ressemblance de Dieu en acquérant la bonté. Fais-toi un cœur de miséricorde et de bienveillance, afin de revêtir le Christ ».

C’est tout le sens des œuvres de miséricorde que le pape François nous invite à pratiquer. Le pape François nous redit qu’il y a 14 œuvres de miséricorde : sept corporelles, sept spirituelles. Sept œuvres corporelles dont les six premières sont mentionnées en Mat 25 : « donner à manger  aux affamés, donner à boire à ceux qui ont soif, vêtir ceux qui sont nus, accueillir les étrangers, assister les malades, visiter les prisonniers ». On y ajoute le devoir d’ensevelir les morts. Cela peut vouloir dire assister les mourants, ne pas délaisser les personnes âgées. Les œuvres spirituelles sont détaillées également : « conseiller ceux qui en ont besoin, instruire les ignorants, exhorter les pécheurs, consoler les affligés, pardonner les offenses, supporter patiemment les personnes ennuyeuses, prier Dieu pour les vivants et pour les morts ». Ces œuvres corporelles et spirituelles sont en réalité sont inséparables. Je ne peux pas pratiquer les unes au détriment des autres. Si je m’attache exclusivement aux œuvres corporelles, je risque de me transformer en ONG en oubliant la dimension spirituelle, comme le dit le pape François. D’un autre côté, si je reste exclusivement dans les œuvres spirituelles, je m’expose à oublier la dimension concrète, terre à terre de la miséricorde. Comme le disait Mère Térésa : « Donne tes mains pour servir et ton cœur pour aimer. »

Détaillons quelque unes des formes que doit prendre la miséricorde à l’égard de nos frères.

3.1. Premièrement, la miséricorde du jugement

Le Seigneur nous dit en Mat 7, 1-3) : «  Ne jugez pas afin de n’être pas jugé. Qu’as-tu à regarder la paille qui est dans l’œil de ton frère alors que la poutre qui est dans le tien, tu ne la vois pas. » On peut citer également Jacques 4, 11-12 : « Celui qui parle mal de son frère ou qui juge son frère, parle mal de la loi et juge la loi. Or, si tu juges la loi, tu n’es plus un observateur de la loi, mais tu t’en fais juge ». Une remarque s’impose. Le Seigneur ici ne nous demande pas de n’exercer aucun jugement sur les autres, car le jugement est une faculté de notre intelligence qui nous permet d’évaluer les situations, de poser un discernement sur les personnes et sur les évènements. Ce n’est pas tant le jugement que nous devons enlever de notre cœur que le venin de notre jugement, à savoir l’esprit de rancune et la condamnation. Car un jugement peut être positif et s’achever en pardon et en justification, ou alors il peut être négatif et s’exprimer sous la forme d’une condamnation sans appel et c’est cela qui est terrible. L’apôtre Jacques nous le dit dans sa lettre : « Le jugement est sans miséricorde pour celui qui n’a pas fait miséricorde, mais la miséricorde l’emporte sur le jugement » (2,13). Saint Jacques affirme ici que nous serons jugés sur la miséricorde et la prévenance que l’on aura eu à l’égard de ses frères, surtout ceux que le monde méprise. C’est un critère absolu.

3.2. Deuxièmement, la miséricorde de la langue

C’est encore saint Jacques qui dit dans sa lettre, 3,5-10 : « Voyez : un tout petit feu peut embraser une très grande forêt.  La langue aussi est un feu ; monde d’injustice, cette langue tient sa place parmi nos membres ; c’est elle qui contamine le corps tout entier, elle enflamme le cours de notre existence, étant elle-même enflammée par la géhenne. Toute espèce de bêtes sauvages et d’oiseaux, de reptiles et d’animaux marins peut être domptée et, de fait, toutes furent domptées par l’espèce humaine ; mais la langue, personne ne peut la dompter : elle est un fléau, toujours en mouvement, remplie d’un venin mortel. Elle nous sert à bénir le Seigneur notre Père, elle nous sert aussi à maudire les hommes, qui sont créés à l’image de Dieu. De la même bouche sortent bénédiction et malédiction. Mes frères, il ne faut pas qu’il en soit ainsi ». Sainte faustine écrit dans son Petit journal : « Ô Jésus, miséricorde ! Je tremble à l’idée de devoir rendre compte de ma langue ; en elle se trouve la vie, mais aussi la mort, car parfois nous tuons avec notre langue, nous commettons de véritables meurtres – et nous devrions considérer que cela n’a pas d’importance ? » (119).

3.3. Troisièmement, la miséricorde du regard

Ce que dit saint Jacques de la langue peut se dire également des yeux, car avec le regard nous pouvons tout autant tuer ou faire vivre, répandre du venin ou réconforter le cœur de nos frères.

Partager la miséricorde, c’est oser des gestes de réconciliation avec ceux qui nous ont blessés ou que nous avons blessés. C’est le sens de la prière des ennemis que Jésus nous demande de vivre concrètement dans l’évangile (Mt 5, 45-48) : « Aimez vos ennemis et priez pour ceux qui vous persécutent, afin d’être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux. Vous donc soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait. » Jésus ne nous demande pas ici une perfection impossible à atteindre, il demande que l’on apprenne à aimer comme lui en reconnaissant en chaque être humain, quel qu’il soit, un frère ou une sœur à aimer en lui.  Saint Augustin disait de ceux que nous n’aimons pas assez, voire que nous tenons pour de véritables ennemis : « Il nous faut les aimer non parce qu’ils sont nos frères, mais pour qu’ils le deviennent ».  Cela ne va pas de soi, évidemment, mais c’est le Christ qui, seul, peut nous en donner la grâce.

Conclusion

Pour conclure, je dirais que l’on ne comprend rien à l’histoire récente de l’Église si on ne la vit pas à la lumière de la miséricorde. Le témoignage de la miséricorde n’a jamais été aussi urgent et pertinent qu’aujourd’hui. C’est la seule chose que l’Église puisse dire et manifester au monde. Et c’est ce qui fait dire au Pape François que notre époque est un kairos pour la miséricorde.

En cette Cité de l’Immaculée où Marie est aimée et priée depuis vingt ans, je pense à l’évangile de Cana et à l’ordre de Jésus aux serviteurs consécutif à la l’intercession suppliante de sa Mère : « Remplissez d’eau ces jarres ». Nous qui sommes rassemblés en ce lieu, nous sommes les petites jarres – oserais-je dire les petites « cruches » – que le Seigneur veut remplir à ras-bord du vin de sa miséricorde. Saint Paul dit dans la lettre aux Romains que le « dessein » de Dieu est « de manifester la richesse de sa gloire envers des vases de miséricorde qu’il a d’avance préparés pour sa gloire » (9,23). Comme c’est magnifique ! C’est ce beau passage, certainement, qui a dû inspirer saint Irénée de Lyon lorsqu’il écrit à son tour : « Au commencement, ce ne fut pas parce qu’il avait besoin de l’homme que Dieu modela Adam, mais pour avoir quelqu’un en qui déposer ses bienfaits ». Et il ajoute un peu plus loin : «c’est lui (le Seigneur) qui nous a modelés et préparés précisément pour que, étant avec lui, nous participions à sa gloire » (AH IV,14,1-2).

En ce beau jubilé de la Miséricorde, pour que nous répondions à plein à notre vocation d’enfants de Dieu destinés à la gloire, je nous invite à être ces « cruches » toutes offertes au remplissage de l’amour. Nos capacités sont sans doute très diverses, mais comme le disait la petite Thérèse, que nous soyons « dés à coudre » ou « grands verres », cela ne change rien au fait que Dieu veut nous remplir tout entier. Et plus une âme se laisse remplir de l’amour de Dieu, plus elle vit le ciel par anticipation parce que c’est la vie nouvelle de Pâques qui déjà la comble. Le remplissage, le Seigneur le réalise au moyen de la prière et des sacrements. On ne prie pas dans un autre but que de se laisser combler par l’amour de l’Esprit Saint. Et une fois rempli, un chrétien, ne peut que faire redéborder sur les autres l’amour reçu de Dieu. C’est son devoir de disciple-missionnaire. Impossible en effet de garder l’amour pour soi. L’amour reçu est fait pour être redonné, car c’est la nature même de l’amour que de se répandre et de se communiquer.

Qu’en cette Année sainte de la Miséricorde, nous fassions advenir le règne de Dieu en remplissant notre vie d’amour et en étant témoins de cet amour pour les autres !